2 – La participation des étudiantes du Master EFISE
Face à l’ampleur de la commande et la temporalité courte de la recherche, les chercheur.e.s ont invité dix étudiantes du Master EFISE à contribuer au projet. Ces dernières ont participé aux réunions avec les parents, ont réalisé les comptes-rendus des réunions, ont participé à la passation des questionnaires et ont réalisé les entretiens avec les parents. À la fin de cette recherche, les chercheur.e.s ont interrogé collectivement les étudiantes (le 4 février 2022), dans le cadre d’un cours, sur cette expérience de contribution à une recherche participative avec des personnes concernées. Leurs réponses indiquent que la recherche a fait évoluer leurs perceptions à plusieurs niveaux.
2-1 Evolution du regard sur les parents
Les étudiantes, pour certaines travailleuses sociales en protection de l’enfance, ont souligné à quel point la recherche a contribué au changement du regard qu’elles avaient sur les parents : « j’ai été très touchée par les rencontres avec ces parents, ça a modifié mon regard sur le parent qu’on pourrait croire que mauvais ». Chaque réunion avec les parents a été l’occasion de rencontres riches sur le plan humain, permettant aux étudiantes de se rendre compte de la souffrance éprouvée et de la violence institutionnelle vécue par les parents, « une plaie ouverte ». L’espoir que les parents ont exprimé de pouvoir retrouver leurs enfants et de changer l’ASE en tant qu’institution a marqué significativement les étudiantes. Cependant, les participants à la recherche ont affirmé que pour que cet espoir devienne un moteur de transformation possible de la réalité institutionnelle, pour que la participation des parents devienne un levier de changement, il faut se sentir autorisé, être soutenu et outillé. La participation, étant également un processus d’apprentissage, peut favoriser le développement de différentes capacités d’agir.
La dimension collective et le soutien mutuel entre les parents ont été également un évènement marquant. Une étudiante l’exprime ainsi : « j’ai été frappée par l’implication et la compassion des parents entre eux pendant les réunions avec la volonté d’apporter des idées de changement. Ils nous transmettaient cette émotion ».
2-2 Regard sur le système de la protection de l’enfance
Malgré l’exercice professionnel dans le champ du travail social, la recherche a permis à beaucoup d’entre elles de « se sentir plus acteurs en protection de l’enfance, avoir une connaissance plus large de la protection de l’enfance et du dispositif de façon plus détaillée ». Cependant, lorsque les étudiants allaient à la rencontre des parents pour remplir avec eux le questionnaire et lorsque les rendez-vous ont été fixés dans les bureaux du secteur, elles ont témoigné d’un « accueil mitigé », elles ont senti des résistances de la part des chef.fe.s de service notamment pour que ces rendez-vous puissent se tenir dans les locaux du secteur – alors même que ces rencontres avaient été convenues en amont par l’intermédiaire de l’OPPE.
2-3 Regard sur les chercheur.e.s
Même si les étudiantes connaissaient les chercheur.e.s dans le cadre de la formation en master EFISE (Education familiale et intervention socio-éducative en Europe), la recherche COPA75 a offert un espace d’échanges plus symétriques « on s’est senti l’un.e d’eux ». Les étudiantes ont découvert la « cuisine » de la recherche, « on est étudiant différemment après », a souligné une étudiante.
2-4 Regard sur la recherche
L’association des étudiantes à la conception, la mise en œuvre et l’évaluation des effets de la recherche leur a permis d’apprendre « comment cela fonctionne ». Cette implication a été coûteuse pour les étudiantes qui, pour une grande partie, exercent un emploi en plus de la formation. L’une étudiante le dit en ces termes : « il était difficile de s’impliquer en termes de temps, épaté par l’organisation nécessaire, dur de suivre les infos individuellement, perdue à certains moments ». Cependant, toutes ont compris l’enjeu majeur, pour toute recherche qui interroge les expériences parentales : « sur les façons de rencontrer des parents en dehors de l’intermédiaire ASE ». En effet, l’accès aux parents par les chercheurs en général constitue un frein majeur à la réalisation d’études recueillant leurs points de vue.