Le retour à domicile en protection de l’enfance en France : Regards des travailleurs sociaux sur une thématique centrale mais négligée
Thèse menée par Léa Ladeira, sous la direction de Séverine Euillet, Maîtresse de conférence HDR, Cref, Université Paris Nanterre.
En France, fin 2023, parmi les 384 900 mineurs et jeunes majeurs qui bénéficient d’une mesure de l’aide sociale à l’enfance (ASE), 190 200 mineurs (49,4%) sont placés selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques. Le constat est que le placement est une mesure de protection répandue, même si elle ne doit avoir lieu qu’en dernier recours, comme le rappelle la loi de février 2022. Pensée et appliquée pour retirer le mineur d’un contexte de risque ou de danger, cette mesure peut être transitoire afin de permettre un retour en famille ou, parfois, malgré la législation, s’inscrire dans une plus longue durée.
La décision du retour en famille est influencée par de nombreux facteurs sociaux, familiaux, individuels et en lien avec le déroulement de la mesure (Balsells et al., 2015; Chateauneuf et al., 2022; Esposito et al., 2022; Farmer & Wijedasa, 2013). Malgré une première phase initiale dite de « lune de miel », le retour peut être une période sensible où des difficultés apparaissent, amenant parfois à un nouveau placement. La loi de 2016 préconise d’instaurer systématiquement des mesures d’accompagnement au retour, sans toutefois en préciser les moyens. En septembre 2021, la Haute Autorité de Santé souligne le manque de données permettant d’évaluer les retours en famille (nombre, qualité, conditions…).
Le retour en famille est un enjeu clé de la protection de l’enfance, mais les données scientifiques sur ce sujet sont rares. Aussi, cette recherche doctorale dans le système français vise à approfondir les connaissances, dresser un panorama des pratiques d’accompagnement, recueillir les expériences des professionnels et permettre une réflexion autour des interventions socio-éducatives.
Comment le retour en famille est-il pensé, préparé et accompagné en protection de l’enfance en France pour éviter les récidives ? Quel est le point de vue des travailleurs sociaux à ce sujet ?
Pour répondre à ces questions de recherches, une méthodologie qualitative est mise en place, validée par le Comité Éthique de la Recherche de l’université Paris Nanterre. L’objectif est de réaliser des entretiens semi-directifs auprès de 50 travailleurs sociaux. Des entretiens avec d’autres professionnels, des parents et des mineurs peuvent également avoir lieu afin d’apporter un étayage et une compréhension du retour en famille.
Bibliographie :
Balsells, M. À., Pastor, C., Mateos, A., Vaquero, E., & Urrea, A. (2015). Exploring the needs of parents for achieving reunification : The views of foster children, birth family and social workers in Spain. Children and Youth Services Review, 48(C), 159‐166.
Chateauneuf, D., Drapeau, S., Leblanc, K., Saint-Jacques, M.-C., Noël, J., & Fortin, M.-C. (2022). Le retour en milieu familial à la suite d’un placement en protection de l’enfance : Regard sur les dynamiques relationnelles entre parents et intervenants sociaux. Recherches familiales, 19(1), 69‐83. Cairn.info. https://doi.org /10.3917/rf.019.0073
Esposito, T., Caldwell, J., Chabot, M., Delaye, A., Trocmé, N., Hélie, S., & Fallon, B. (2022). Reunification trajectories in Quebec : Acknowledging chronic family challenges to support stability. Child Abuse & Neglect, 130(Pt 3), 105437. https://doi.org/10.1016/ j.chiabu.2021.105437
Farmer, E., & Wijedasa, D. (2013). The Reunification of Looked After Children with Their Parents : What Contributes to Return Stability? The British Journal of Social Work, 43(8), 1611‑1629.