|

De la maison à la salle de classe : Enquête sur le rôle du courtage culturel dans la transition des enfants vers l’école formelle – Le cas de l’Extrême-Nord Cameroun

Thèse de doctorat de Martin Dikwa, sous la direction du Pr Gilles Séraphin.  

Cette thèse explore le rôle du courtage culturel dans la transition des enfants de leur environnement familial vers l’école formelle, en s’appuyant sur une enquête qualitative menée dans des communautés rurales et périurbaines de l’Extrême-Nord du Cameroun. Dans cette région marquée par une grande diversité culturelle, linguistique et religieuse, mais aussi par des barrières linguistiques et des défis socioéconomiques et sécuritaires (pauvreté, faible accès aux services publics), la scolarisation constitue souvent une rupture entre deux univers distincts : celui de la maison, enraciné dans les traditions locales, et celui de l’école, structuré par les normes du système éducatif formel, inspiré du modèle occidental.

L’étude s’intéresse aux acteurs qui font le lien entre ces deux mondes – les courtiers culturels –, qu’ils soient parents, enseignants issus du milieu local, chefs traditionnels, animateurs communautaires, ONG ou pairs plus âgés. Elle cherche à comprendre qui sont ces courtiers, comment ils acquièrent leur légitimité, quelles stratégies ils mobilisent, et quel est leur impact sur l’inclusion et le rendement scolaires des enfants. L’objectif central est d’identifier les dynamiques locales de médiation qui facilitent ou freinent l’entrée et l’adaptation des enfants dans le système scolaire.

Le cadre théorique articule quatre perspectives complémentaires : le Fonds de connaissances (Moll), la Théorie de l’activité culturelle et historique – CHAT (Engeström), la théorie du capital social (Coleman), et la pédagogie adaptée à la culture (Gay). Ces approches permettent de valoriser les savoirs communautaires, d’analyser les tensions entre les systèmes maison/école, et de proposer des pratiques pédagogiques culturellement pertinentes.

La méthodologie repose sur une étude de cas multiples (entretiens, observations, focus groups, collecte d’artefacts culturels), dans une approche ethnographique sensible au contexte. Les résultats attendus visent à nourrir les réflexions sur une éducation inclusive et équitable, adaptée à des contextes multiculturels. Cette recherche entend aussi contribuer à la décolonisation des savoirs éducatifs en valorisant les ressources locales souvent ignorées par les politiques et les programmes officiels.

Les résultats de cette étude pourraient directement être utiles aux décideurs camerounais en matière d’éducation, en particulier aux ministères de l’éducation, ainsi qu’aux ONG et aux agences de développement travaillant dans le secteur de l’éducation. La recherche offrira des recommandations pratiques pour améliorer l’engagement parent-école dans des contextes culturels diversifiés, former les éducateurs à travailler efficacement avec les familles issues de milieux peu favorisés, concevoir des programmes de transition scolaire inclusifs et adaptés à la culture.

Topic: From Home to Classroom: Investigating the Role of Cultural Brokering in Children’s Transition to Formal Schooling – The Case of Cameroon’s Far North Region

This doctoral research investigates the role of cultural brokering in supporting children’s transition from the home environment to formal schooling, through a qualitative study conducted in rural and peri-urban communities in the Far North Region of Cameroon. This region is characterised by significant cultural, linguistic, and religious diversity, as well as language barriers and complex socio-economic and security challenges, including poverty and limited access to basic services. In such a context, entering school often represents a rupture between two distinct worlds: the home, rooted in local traditions, and the school, governed by the norms of a formal education system largely shaped by Western models.

The study focuses on the actors who mediate between these worlds—cultural brokers—who may include parents, locally rooted teachers, traditional leaders, community workers, NGOs, and older siblings. It aims to understand who these brokers are, how they gain legitimacy, what strategies they use, and what impact they have on children’s integration into the school system. The central goal is to identify local mediation dynamics that either facilitate or hinder children’s entry into and adaptation to formal education.

The research is grounded in four interrelated theoretical frameworks: Funds of Knowledge (Moll), Cultural-Historical Activity Theory – CHAT (Engeström), Social Capital Theory (Coleman), and Culturally Responsive Pedagogy (Gay). Together, these perspectives shed light on the value of community knowledge, the systemic tensions between home and school, and the need for culturally grounded teaching practices.

The methodology is based on a multi-case ethnographic design involving interviews, participant observation, focus groups, and the collection of cultural artefacts. The research seeks to contribute to the design of inclusive and equitable educational practices that are better aligned with the socio-cultural realities of learners. Beyond the local context, this study also aims to engage in the global conversation on decolonising education, by highlighting the potential of local actors and knowledge systems in shaping more just and relevant approaches to early schooling in multilingual and multicultural settings.

The findings of this study could be directly useful to Cameroonian education policymakers, particularly ministries of education, as well as NGOs and development agencies working in the education sector. The research will offer practical recommendations for improving parent-school engagement in diverse cultural contexts, training educators to work effectively with families from disadvantaged backgrounds, and designing inclusive and culturally appropriate school transition programmes.

Publications similaires