Appel à articles : Famille et numérique (Recherches Familiales n° 22, janvier 2025)

Appel à articles pour Recherches Familiales n° 22 (parution en janvier 2025).

Date limite de proposition des articles complets : 15 mai 2024.

« Famille et numérique »

La recherche en sciences sociales sur les usages du numérique s’intéresse depuis le début des années 2000 à l’impact des technologies de l’information et de la communication sur les relations familiales, de couple et sur l’enfant, d’abord dans le monde anglophone et dans la recherche francophone, notamment en France et au Québec. Le développement simultané des réseaux sociaux et des téléphones intelligents au mitant des années 2000 généralisera une sociabilité dite des réseaux qui impactera les relations de couple mais aussi les relations parents-enfants dans leurs dimensions affectives et éducatives et les relations familiales intergénérationnelles créant une sorte d’ « entrelacement des pratiques de communication et de loisir »[1] dont la famille est un des terrains privilégiés. Les sociabilités adolescentes et les pratiques éducatives sont également durablement impactées par cette diffusion horizontale (entre les usagers) et verticale (de diffuseurs vers les usagers). En France, en 2022, l’enquête périodique du Crédoc[2] montre par exemple que 87 % des personnes possèdent désormais un smartphone (en augmentation constante) qui devient l’équipement numérique le plus plébiscité comme mode d’échange, d’information et de loisirs. Cette sociabilité numérique qui semble transcender les différences d’âge et de génération peut prendre des formes très variées, incluant les jeux en ligne, les communications des réseaux sociaux, les messageries instantanées, etc.

On devra donc s’interroger sur les contours et les modalités de cette sociabilité numérique dans et hors de l’espace familial pour les différentes générations concernées comme au sein du couple lui-même. 

Outre des usages ludiques ou de loisirs, le numérique s’impose comme un mode de communication et d’échanges dont la famille n’est évidemment pas absente. Avec le numérique, c’est aussi la séparation entre le loisir et l’activité professionnelle qui se trouve remise en cause. Par exemple, l’intrusion du professionnel dans des temps et des espaces personnels familiaux s’est révélée comme un phénomène majeur avec le développement d’un télétravail essentiellement basé sur le numérique. L’ « entrelacement » de pratiques numériques a priori différenciées téléologiquement et le développement toujours croissant d’un usage du numérique dans nos activités peuvent conduire à réévaluer ou réexaminer le contenu et les formes des rapports familiaux (dans le couple, dans les relations parents-enfants, dans les formes de sociabilité des jeunes adultes, etc.). 

Cela a été observé pendant les périodes de confinement dues au Covid, cela s’observe toujours quand des sites de soutien à la parentalité sont consultés par des parents inquiets ou « dépassés » ou lorsque les naissances ou les deuils sont ainsi annoncés à la parentèle et aux cercles amicaux. Plusieurs pistes peuvent donc être à ce titre évoquées, qui ne sont évidemment pas exhaustives. 

Numérique et éducation 

La réflexion consacrée au numérique éducatif occupe désormais une place non négligeable en sciences humaines, principalement autour d’une réflexion sur l’école et ses environnements numériquesLa numérisation de la société affecte les rapports éducatifs et partant, a une influence directe ou indirecte sur la famille et sur l’enfant, parfois plus en capacité que ses parents de s’intégrer dans un environnement relativement nouveau. Paradoxalement paré de toutes les vertus ou chargé de tous les vices, le numérique dans l’éducation apparaît par exemple comme une solution pour modifier le regard porté sur l’autisme supposé être à l’origine de troubles du développement chez l’enfant et l’adolescent (hyperactivité., troubles de la concentration et dans la construction identitaire, perturbation des relations intrafamiliales…).

L’observation et l’analyse continues des sciences sociales s’imposent pour en saisir les effets réels et interpréter les lignes de changement constatées. Des travaux empiriques récents devraient en fournir la matière. Ce sont eux que nous souhaitons accueillir prioritairement.

Numérique et générations

On a très tôt observé l’adhésion croissante des générations les plus âgées aux outils numériques en vue d’échanger avec leurs petits enfants. D’abord pensée comme une logique de compensation de la distance géographique, cette adhésion a été de plus en plus perçue comme un moyen de consolidation des relations intergénérationnelles. Des dispositifs soutenus par l’État, tels « Internet accompagné » et « e-seniors », ont même tenté de l’institutionnaliser. Des aides ascendantes, mais aussi descendantes, ont été observées entre les générations, souvent sous forme d’initiation et d’aide à la manipulation des outils numériques. Mais au-delà, ce sont les problématiques de contrôle et de surveillance des activités et comportements des uns et des autres qui ont été réactivées, ou encore celles du « déracinement » et de l’acculturation à la société d’accueil pour les personnes et les familles migrantes.

Il serait utile de prolonger cela par une connaissance plus fine de l’ampleur de ces interactions entre les générations, de leur « durabilité » et de leurs éventuelles conséquences pour les uns et les autres. Là encore, des articles relatant des travaux empiriques récents seraient les bienvenus.

Numérique et parentalité 

Des états des lieux sur la question de l’incidence des nouvelles technologies sur la relation parent-enfant ont déjà été proposés. C’est ainsi qu’on voit que celles-ci pénètrent le domicile familial dès la conception de l’enfant, qu’elles accompagnent les parents dans l’éducation de ce dernier, en servant par exemple de source de soutien, d’écran-sitter, ou même de moyen privilégié de la communication en cas d’éloignement. L’exposition aux écrans se fait avant même que le tout-petit sache marcher, elle perdure tout au long de son évolution. 

L’usage de ces technologies numériques peut toutefois être symptomatique de difficultés relationnelles et devenir une source de problèmes quand l’enfant n’arrive plus à pouvoir s’en passer, à tout le moins aux yeux de ses parents. Les technologies numériques modifient en effet le poids de ce que représentent les notions d’absence et de présence des parents auprès de leur enfant, elles peuvent devenir une sorte de refuge et de substitut émotionnel pour ce dernier. Elles apparaissent finalement comme un révélateur des difficultés familiales sous-jacentes. 

D’aucuns y ont décelé une manière de « panique morale » chez des parents submergés par cette technologie quand d’autres y voient une source maîtrisable des développements sensori-moteurs et cognitifs de l’enfant. Ces constats, surtout établis dans le monde anglo-américain, mériteraient d’être vérifiés et affinés dans le contexte français. De telles observations seraient accueillies favorablement.

Numérique et sociabilités familiales

L’enquête du Crédoc susmentionnée a montré, à propos des jeux vidéo, que jouer à plusieurs constitue sans doute une nouvelle manière de sociabilité familiale. Elle rappelle aussi que cette dernière pratique a connu un essor notable pendant les périodes de confinement, où parents et enfants passaient leur temps ensemble. Cependant, elle soulignait aussi que la majorité des joueurs (69%) jouaient seuls et qu’uniquement la tranche d’âge des 18-24 ans pratiquait majoritairement (51%) le jeu-vidéo à plusieurs. Cela signe-t-il, hors périodes exceptionnelles, le déclin de la sociabilité familiale qui s’était installée autour du téléviseur dans les années 1960-70 ? Ou n’avons-nous affaire qu’à une nouvelle « panique morale » passagère comme toutes celles qui ont souvent accompagné l’arrivée d’une nouvelle technologie ? 

Un point précis sur les changements introduits par les technologies numériques dans les sociabilités familiales serait ici souhaitable. Non seulement dans leur matérialité (l’usage des appareils numériques), mais encore dans les manières ou les codes suivis dans ces usages et, subséquemment, dans les rapports entre les membres du groupe familial, et donc sur le cadre même de la sociabilité familiale ou, si l’on veut, ses frontières. Des articles synthétiques étayés sur des observations empiriques sont ici souhaités.

Numérique et conjugalité

On s’est interrogé sur le fait de savoir si l’intrusion des sites numériques de rencontre était à regarder comme un facteur favorable ou, a contrario, défavorable à l’établissement et à la survie du couple conjugal. La plupart des travaux rapprochant numérique et conjugalité se sont en effet penché sur le moment de la rencontre, le moment de faire couple et union ou de ne pas le faire. La perception des risques encourus a même été étudiée empiriquement. Mais, la vie numérisée empirique du couple a été moins documentée. Comment le numérique occupe-t-il l’espace relationnel du couple déjà formé ? que modifie-t-il de la relation ? quels effets lui sont-ils imputables ? etc. C’est sur cette dimension de la vie conjugale traversée par la présence du numérique que nous attendons des contributions originales.

En somme, le comité de rédaction de Recherches familiales souhaite, pour ce numéro consacré à « famille et numérique », privilégier les articles apportant des éléments nouveaux et récents d’observation sur les effets des usages du numérique dans les différentes rubriques présentées ci-dessus. Celles-ci, toutefois, ne sont pas exclusives et le comité reste ouvert aux propositions qui pourraient se faire sur d’autres aspects de la vie familiale. 

Il va de soi que, eu égard au caractère multidisciplinaire de la revue, les propositions puissent venir d’horizons disciplinaires différents. Il est cependant souhaité, pour certaines rubriques déjà explorées avantageusement par une discipline (sociologie, psychologie, par exemple), que des propositions venant d’autres disciplines (droit, sciences de l’éducation, pédopsychiatrie…) lui soient adressées. 

Les articles entièrement rédigés sont à proposer au Comité de lecture de Recherches Familiales avant le 15 mai 2024. La revue paraîtra en janvier 2025.

Pour mieux connaître la revue : http://www.unaf.fr/spip.php?rubrique181

Pour consulter le règlement intérieur : http://www.unaf.fr/spip.php?article16501

Indications techniques :

1- Article :

40 000 signes, notes de bas de page et espaces compris. L’article doit être accompagné d’un résumé de 700 à 900 caractères, espaces compris.

2- Références :

Ne pas utiliser le système américain (nom de l’auteur·e et page entre parenthèses), mais le système « français » de référence intégrale en note de bas de page. Pour ce référencement, voir les articles de la revue déjà publiés sur le site http://www.unaf.fr/spip.php?rubrique181 ou sur https://www.cairn.info/revue-recherches-familiales.htm

La revue Recherches Familiales est publiée en version papier et en version électronique sur les sites Portail Doc de l’Unaf et Cairn. La revue fait l’objet de près de 30 000 téléchargements d’articles par mois. 

La revue Recherche Familiale fonctionne selon des principes stricts de lutte contre le plagiat, y compris d’autoplagiat. L’auteur·e doit s’engager sur l’honneur à garantir que l’article proposé est un travail original, fruit d’un travail personnel. Ce travail a été rédigé de manière autonome, sans recourir à d’autres sources ou outils que ceux que l’auteur·e a explicitement déclarés comme tels. Ce travail ne comporte pas de plagiat, ni d’autoplagiat. Tous les développements repris d’une source extérieure sont cités entre guillemets avec un renvoi précis à la source dûment identifiée (y compris Internet). Le fait de ne pas citer une source, ou de ne pas la citer correctement, est constitutif de plagiat. Le plagiat est considéré comme une faute grave par le comité de rédaction de la revue Recherches Familiales, qui se réserve la possibilité de la dénoncer. 

Envoyez votre article (fichier en format Word ou Rtf) par courrier électronique à recherches.familiales@unaf.fr. Date limite d’envoi : 15 mai 2024. Un accusé de réception vous sera envoyé. 

A noter : Si l’article est susceptible d’être publié (décision du comité de rédaction), il sera demandé à l’auteur·e de signer deux documents : une autorisation de reproduction/cession de droits et une déclaration sur l’honneur assurant que l’article présenté ne comporte pas de plagiat. 


[1] Voir Zbigniew SMOREDA ( dir.), « Entrelacement des pratiques de communication et de loisir », Réseaux, 2007, pp. 145-146.

[2] Crédoc, Baromètre du numérique : Enquête sur la diffusion des technologies de l’information et de la communication dans la société française, édition 2022.

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